Une vie d’exchange student – acte 2

Une part importante de notre temps se déroule à l’extérieur. Et pour cela, Mumbai est un endroit formidable.

Nous n’allons plus à l’école depuis… octobre. En fait, dès le début nous n’y passions pas nos journées entières. Il est très commun pour les élèves indiens de sécher un ou deux cours sur cinq. La mentalité et le niveau sont trop différents. Je dirais que c’est en octobre qu’il n’y avait plus d’exchange student en cours. Mais cela ne veut pas dire pour autant qu’il faut rester à la maison. En fait, j’ai mis un point d’honneur à être dehors tous les jours, à l’exception du Dimanche. C’est le seul jour où toute la famille est à la maison, il est normal d’y rester.

Le rythme Indien est bien différent du rythme Français. Le levé se fait entre 8 et 9h. Le petit déj’ à 10h et le départ au boulot à 11h. Généralement, je pars aux alentours de 11h30. Quinze ou vingt minutes de marche jusqu’à la gare, on met en place ses talents de tacticien pour réussir à choper le train qu’il nous faut, en sachant qu’il y a huit plateformes à Borivali, et une foule équivalente à la population de Lannion (I swear ! C’est prouvé !).

Après, c’est parti pour 30 minutes à 1h15 de train. Cela dépend du lieu de rendez-vous. En ce moment, c’est quand même plus 1h15, puisque nous passons tout notre temps dans le Sud de Mumbai, l’ancien Bombay, le vieux port colonial anglais. Les bâtiments sont magnifiques et les mystères derrière chaque façade d’immeuble. Dan Brown devrait sérieusement venir écrire son prochain bouquin ici.

Un bâtiment caché derrière une végétation tropicale entre deux quartiers militaires, c’est une église afghane. Un symbole sur le devant de cette maison colonial : c’est un bien de la communauté parsi. Cette communauté très ancienne descend des Perses. Ses membres ont émigré en Inde et au Pakistan suivant des persécutions. Leur savoir et leur éducation les ont rapidement menés au plus haut de la société. A Mumbai, ils représentent une élite extrêmement riche. Ils sont cependant en voie de disparition à cause de certains protocoles très stricts au niveau de la descendance. Leurs membres sont principalement implantés dans le sud de la ville. Leurs propriétés sont indénombrables et leurs temples à l’architecture grecque renferment d’innombrables secrets. Leur religion même est très confuse pour les gens extérieurs. Ils détiennent aussi la plupart des cafés et des épiceries du vieux Bombay. Ces endroits là étaient les repères des plus grand malfrats de Mumbai, et aujourd’hui encore ce sont les lieux de rencontre des truands des temps modernes. Avec un groupe d’exchange student nous avons nos habitudes dans les cafés les plus anciens. Mais quel intérêt à trainer dans des endroits pareils, me diriez-vous ? Eh bien, outre un décor d’avant-guerre et une nourriture peu cher, c’est là que les rencontres se font. Vous savez, ces rencontres-là !

SAM_3375La plus mémorable est quand même celle d’hier ! Je m’en souviendrai à jamais. Avec Pierre, Anna et Eugenio, nous rentrons en file Indienne (involontaire) dans Kyani Irani, et paf ! Qui est assis sur la table à l’entrée ? Gregory David Roberts, célèbre auteur de Shantaram. Cet homme est une légende, cet homme a vécu tellement de chose, et il lui a fallu un livre de 980 pages pour le raconter. S’échapper d’une prison australienne ? Trop facile. Fuir en Inde avec une copie de passeport ? Simple comme bonjour. Atterrir à Bombay, vivre dans un bidonville, apprendre Hindi, Marathi et Ourdou, travailler dans la mafia locale et partir en croisade en Afghanistan, nous avons rencontré quelqu’un, très cher lecteur. Mais nous avons surtout rencontré un homme d’une grande écoute, et qui semblait vraiment intéressé par nous, petit exchange studentsSAM_3377. Alors, photo, autographe, serrage de main, discussion, et voilà que le mentor des exchanges student s’en va sur sa moto. Imaginez, pour les fans de J.K. Rowling, que vous vous baladez à Londres et que dans une ruelle étroite vous tomber sur Harry Potter, quel sentiment avez-vous ? Désolée, je ne peux pas vous éclairer, je suis encore sous le choc. Par contre, je vous invite vivement à lire ce livre, Shantaram, qui décrit brillamment la vie de Linbaba dans le vieux Bombay, à une époque mystérieuse. En ce moment, Johnny Depp s’attelle à l’adaptation cinématographique. Une tâche ardue mais intéressante, et qui apportera surement beaucoup de reconnaissance à Gregory David Roberts.

Parfois il nous arrive de visiter une mosquée sur une île, un temple hindou sur un récif et une synagogue bleu dans la même journée. Rendez-vous compte à quel point Mumbai est le meilleur terrain de jeu possible et imaginable, et combien cette ville peut nous apporter.

Des fois il faut passer chez un ami qui prépare un court métrage et il faut filer un coup de main. Ou alors, c’est une amie qui a la flemme de sortir, qu’il faut aller secouer chez elle, et au passage s’arrêter pour un bol de jus de mangue… Ou sinon, c’est un festival du film, ou des rues que nous ne connaissions pas. Une virée à la plage, ou au musée. Il y a aussi les galeries d’art, très nombreuses à Mumbai, ou juste les artistes de rue.

Nous vivons dans une ville immense, il y a tellement à faire. Tout prend plus de temps avec le train, la marche à pied, mais c’est ainsi que nous avons accès à chaque recoin de Mumbai. Il est impossible de rester à la maison ici. Il m’arrive parfois de faire mon sac le matin, mais quelqu’un me rappelle qu’il est dimanche. Quelle déception, je bous à l’idée de devoir attendre une journée et une nuit de plus pour faire ci ou ça.

Aujourd’hui, c’est situation exceptionnelle, une amie part demain, il faut que je lui fasse son mehndi. Un groupe d’amis vient donc scouater à l’appart’ pour l’occasion, mais avant il faut lui trouver un cadeau, c’est parti pour faire le tour de Borivali Market !

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